Nous passerons donc la nuit dans ce village, qui est plus un groupement de quelques maisons qu' un village avec ses habitations, ses rues et ses commerces. Nous avons une cabane pour tout le groupe, les 10 jeunes, une piece ou sont installes 10 matelas a meme le sol, une couverture et une moustiquaire, puis une autre piece pour diner. Mais avant de diner, une douche s'impose : "No shower, no dinner" comme sait si bien le dire notre guide Jimmy. Pour se rendre aux douches et toilettes, il faut emprunter avec precaution un chemin en pente avec des bosses, qui de plus est boueux et glissant a cause de la pluie. On peut s'accrocher aux rembardes en bois pas tres stables pour s'aider.
Ce que j'aime ici, c'est que nous dormons chez l'habitant, et meme si nous ne sommes la que pour une nuit, j'ai un peu l'impression de faire partie de la vie de ce village, l'espace d'une nuit. On peut partager tant de choses en une nuit. Dans ce village, tout le monde se connait (C'est normal, il doit y avoir une cinquantaine de personnes maximum y habitant). Tous les enfants jouent ensemble. Sont-ils de la meme famille ou sont-ils justes amis ? On se demande aussi qui est la mere de qui, qui est le pere de qui, qui est le frere de qui, qui partage les memes genes que qui. On dirait que l'on est dans une grande famille avec le patriarche et la matriarche controlant les entrees et venues, et dirigeant la vie du village.
Lorsque je sors de ma douche, je ne trouve pas Alicia. Elle a du sortir prendre des photos puisque son appareil photo n'est pas sur son matelas. Elle n'a pas froid dehors ? J'ai besoin de quelque chose de plus reconfortant. Je m'allonge sur mon lit pour me reposer un peu avant le diner, quand soudain j'entends des notes de musique et des paroles qui me sont famiolieres : Maybe...You gonna be the one that saves me...And after all...You're my wonderwall...Je cours vers la musique pour voir ce qui se passe, et je decouvre Jimmy notre guide dans un autre des cabanons, preparant le curry du soir, torse nu sous son tablier, avec une des vieilles femmes du village. Le feu sur lequel il fait cuire les aliments me rechauffe. La musique me reconforte. Je demande s'ils ont besoin d'aide. J aimerais participer a ce moment, ne pas etre une simple spectatrice. Ca tombe bien, ils ont besoin de quelqu'un pour leur passer les plats. Aucune competence est necessaire pour se genre de tache, mais ca me plait de preparer le diner en chantant a tue-tete sur du Oasis, coincee entre la vieille femme et Jimmy, dans une maison perdue dans la montagne. On a un peu le temps de discuter et les anglais arrivent sentant l'atmosphere chaleureuse dans ce minuscule cabanon.
Le diner est pret et ainsi nous degustons un curry vert assis sur des coussins par terre, eclaires par des petites bougies. A partir de ce moment, je ne suis plus dans la conversation. Mon corps est bien la, mais mes pensees sont ailleurs. En effet, j'essaye de sentir d'ou viennent les quelques sons de guitare que j'entends depuis 10 minutes. Cette guitare m'intrigue. Elle me rappelle les ambiances de Paris. Mais qui est en train de jouer de la guitare ici ? Alicia me dit qu 'il y a un autre groupe un peu plus loin qui joue de la guitare. Ca y est j ai envie d aller les rejoindre, de me sentir dans une atmosphere qui me rapproche de mon quotidie. J'ai envie de suivre le son, comme alienee par les notes. Mais la nuit est noire, il pleut et il fait froid. J'abandonne tout espoir quand Jimmy arrive accompagne d un de ses potes qui a une guitare avec lui. Qui sait jouer de la guitare ? demande-t-il. J attends de voir si des mains se levent mais personne n y repond. Aparemment je suis la seule a savoir quelaues trucs. Je saisis la guitare et commence a jouer mon tube, evidemment Talk about a revolution de Tracy Chapman. Ca y est je revis. Je ne suis pas du tout une pro, mais une petite amatrice qui sait jouer quelques chansons. Ce qui est bien c'est que au lieu des habituelles titilleries de mes amis, c'est un applaudissement de tonnerre que je recois a la fin de mon live show. A moins que ce soit le tonnerre de l'orage ? Non pas du tout.
Toute facon les enfants du village viennent d'arriver dans notre cabane pour nous faire un petit spectacle. Habilles en tenues colorees traditionnelles, ils se mettent a nous chanter des chansons traditionnelles et meme un petit Frere Jacques auquel je me joins. J'adore, il pourraient rester a chanter des chansons que je ne connais pas toute la nuit, ca ne me derangerait pas. Plus qu une attraction pour divertir nous, les petits touristes naifs que nous sommes, j'ai vraiment l'impression de faire partie, le temps d'une soiree de leur famille. Je suis emue. Emue de voir dans un contexte si different du notre, des moments que j'ai vecus avec ma propre famille. Et c'est pour ca que j ai l impression d etre leur grande cousine Clara trop sympa. Je ne parviens pas a regarder les enfants chanter, alors je m'assieds a cote d eux, frappant ds mes mains, et faisant des grimaces aux plus rebelles. Quand ils quittent la piece, j'ai un pincement au coeur. Est-ce que si je reviens dans 10 ans, ils seront toujours la dans ce village, elevant a leur tour leurs propres enfants ? Que deviendront-ils ? Evolueront-ils ? Iront-ils habiter et travailler en ville ?
La soiree guitare reprend petit a petit son cours. Lesv tubes megamix se succedent et bizarrement Alicia et moi sommes les seules a chanter. Pas de probleme, on se tape des delires improvisation jazzy style! Les autres preferent discuter entre eux, boire des bieres, et fumer de l'herbe soigneusement preparee par la matriarche sous nos yeux, son fils de 5 ans dans les bras. Petit a petit, berces par le son de la pluie se cognant sur notre cabanon, nous passons dans notre dortoir, et nous nous endormons avant meme que le marchand de sable vienne nous saluer.
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