Hier, le temps d'une soirée, je me suis mise dans la peau d'une Djette!
La classe, je sais.
Enfin, je n'étais pas une Djette comme les autres, mixant du bon vieux rock et de l'électro dans une boîte hype de Paris.
J'étais une Old-School Djette, passant des CDs, dont les chansons allaient des années 1950 aux années 2000.
En effet, chaque année, à l'occasion de la fête de l'indépendance américaine, S., une connaissance de mes parents, donne une grande fête chez lui.
Le décor : son appartement, Place des Vosges, avec balcon donnant sur le parc.
Les invités : un peu de tout, de 30 à 60 ans environ, intellectuels, artistes, journalistes, businessmen.
J'arrive avant que la soirée commence et S. m'explique comment sa chaîne hi-fi marche, elle est compliquée à manier en plus d'être très fragile, "personne d'autre que toi n'a le droit d'y toucher". En attendant que les invités arrivent, je classe tous les CDs (une bonne centaine) par décennie et par style. Fifties, sixties, seventies, disco, rock, années 90, dance, tubes des années 2000, et ça s'arrête en 2003. Il y a quelques titres sympas, mais malgré le grand nombre de CDs, les mêmes titres reviennent beaucoup. Je dois me débrouiller avec ce qu'il y a.
Les premiers invités arrivent et pendant qu'ils sont dans la pièce d'à côté, sirotant du champagne et discutant entre eux, Ray Charles tourne. C'est parfait.
Il n'y a pas encore beaucoup d'invités. La première personne à venir me voir est un anglais d'une quarantaine d'années qui travaille de paris pour la BBC. Il ne m'impressionne pas du tout, et il m'énerve déjà. Je lui raconte ce que je fais dans la vie, mes projets, mes ambitions, il ne m'apparaît pas du tout ouvert d'esprit. Il jette un coup d'oeil aux disques et je comprends qu'il est LE fan de disco de la soirée. Il a même ramené son ordi avec sa musique, mais je lui dit que ici, c'est moi qui gère, c'est mon job!
Progressivement, je passe d'une musique d'ambiance à des chansons plus rythmées.
The doors, Blondie, Eurythmics, des bons titres quoi!
Beaucoup de personnes viennent me voir pour me faire part de banalités ou me parler de choses plus intéressantes (comme la beauté de ma barrette par exemple). "C'est vous la Diji? On compte sur vous!". Ils ont tous l'air d'avoir envie de danser, mais personne ne se déhanche.
Il est 23h30. Personne n'a encore dansé. Pourtant le salon se remplit de plus en plus. Que faire? Je tente un elvis? En général c'est ce qui déchaîne les gens. Surtout les plus de 40. Allez, je le lance!
Et c'est parti pour Blue Suede Shoes!
Ils sont sourds ou quoi? Personne ne bouge d'un centimètre.
Là je désèspere.
La chanson qui vient après est Hit the road Jack. Je laisse. Au point où on en est....Et miraculeusement, deux personnes font le premier pas et commencent à se lâcher, en mode twist et rock'n'roll. Il faut que ça continue, alors j'enchaîne habilement avec Unchain my heart, toujours de Ray Charles. Ca bouge déjà un peu plus, un cercle s'est formé au milieu du salon.
Ils commencent à être plus motivés (et aussi plus pompettes), je passe au bon vieux disco des années 80. Et ça marche!
Mais maintenant qu'ils dansent, ils veulent tous quelque chose de particulier. "Mets celle là, elle est bien", "Et tu pourras mettre celle-ci après?", "T'as pas des trucs un peu plus Djeun's?"
Je leur explique que ce n'est pas ma musique, que je n'écoute pas grand chose de ce qu'il y a ici, et que je voulais prendre mon ordinateur, mais qu'il n y avait pas de jack pour le brancher. Donc il faut faire avec ce qu'on a sous la main.
Pendant 2 heures, la fête bat son plein, les invités dansent comme des fous, je ne me rends même pas compte du temps qui passe, je rencontre des amis de mes parents, rencontre mes parents, fait la connaissance de deux filles de mon âge, tout se passe bien!
Chacun danse à sa manière. Des couples dansent des slows sur du rock, d'autres dansent du rock sur du disco, des filles dansent entre elles le zouk ou d'autres sont dans leur bulle, bougeant leur corps endiablé les yeux fermés, comme si la musique les possédait. Parfois, certaines personnes dansent tout seul au milieu de la pièce, faisant vraiment n'importe quoi, ou viennent me crier dans les oreilles des choses qui n'ont aucun sens. L'alcool fait son effet, et je le sens aussi avec mes narines.
Puis à partir d'1h30, ça commence à devenir insupportable. L'appartement commence à se désemplir, et les plus vaillants restent. Plus vaillants? Non, les plus bourrés plutôt.
Tous commencent à m'exaspérer. Un jeune américain latino me demande des chansons particulières, et quand je les passe, il ne danse pas, ça casse l'ambiance. L'anglais n'arrête pas de revenir à la charge. "Mets cette chanson, elle est trop bien" ou "si tu ne mets pas celle-là, on passe à côté de la soirée". Et pareil, à chaque fois, ça casse l'ambiance générale. Il est égoïste, cet anglais. Il veut que je passe que ses chansons préférées, qui en plus, sont nulles, il est le seul à danser dessus. On peut être journaliste à la BBC et avoir des goûts de chiottes."J'ai des réclamations", lui dis-je un moment. Je crois que ça l'a vexé. Il l'aura mérité.
Heureusement deux jeunes, à peine plus agées que moi, se mettent de mon côté. Ca sera Kylie Minogue, Ace of Base, Britney Spears.
Il est 3heures du mat', et les derniers invités ne veulent plus partir. Moi c'est ma seule envie. Heureusement, S. me dit que je peux y aller, alors je laisse le 1er CD de Britney Spears tourner. Ils se débrouilleront avec. Je reçois ma paye, et je suis libre de partir.
Conclusion : Je comprends les Djs maintenant. Jamais je ne demanderai à un Dj de passer telle ou telle chanson, en plus ça déconcentre.
L'année prochaine, je demanderai à S. si je peux être photographe de la soirée, immortalisant ceux qui n'auront aucun souvenir le lendemain.
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